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La littérature qui donne faim

25.05.2009

L’eau à la bouche

Nombreux sont les auteurs à entretenir des rapports passionnés avec la nourriture. Amélie Nothomb utilise la recette depuis son premier roman, Gérard Oberlé tient une chronique littéraire et gustative dans le magazine Lire, "Lettre à Emilie", sans compter son comparse Jim Harrison, écrivain ripailleur devant l’Eternel, qui publie Une Odyssée américaine. Ces dernières semaines, deux ouvrages vous donneront les crocs : "Le livre de Rachel" de Esther David et "Le Palais du Mandarin" de Thanh-Van Tran Nhut.

Nathalie Six

Dans son très explicite Mangez-moi (L’Olivier, 2006), Agnès Desarthe mélangeait cuisine et philosophie. Son héroïne, Myriam, enseignait derrière les fourneaux, le sens de la vie à ses clients, et au final apprenait à se connaître elle-même. Amélie Nothomb a toujours offert à la nourriture une place qui n’a rien d’un second rôle. Dans Hygiène de l’assassin (Albin Michel, 1992), le romancier Prétextat Tach, un obèse, ne s’amuse-t-il pas à laisser sur leur faim les journalistes venus le cuisiner ? Métaphysique des tubes (2000) retrace la petite enfance au Japon de la romancière belge qui se décrit comme un « tube digestif inerte et végétatif dont les activités se bornent à ses besoins primaires ». La biographie de la faim (2004) explore les interdits liés à la nourriture, quant à son dernier roman Le fait du prince, il célèbre les vins de Bourgogne et les champagnes.

Un incontournable dès que l’on parle gastronomie au pays des lettres : Gérard Oberlé, libraire épicurien avant de devenir écrivain. En 1989, avec Les Fastes de Bacchus et de Comus (Belfond), il dresse l’histoire du boire et du manger en Europe. Son Itinéraire spiritueux (Grasset, 200) est le pendant des Aventures d’un gourmand vagabond de Jim Harrison, où tous deux se lancent dans une quête de l’authenticité.

2009, année de l’exotisme

Les éditions Héloïse d’Ormesson proposent de se familiariser avec les traditions culinaires indiennes. Née dans la communauté juive d’Ahmedabad (nord-ouest de l’Inde), Esther David raconte la vie de Rachel, veuve, dont les enfants ont tous émigré en Israël. Dernière juive de son village, situé près de la palpitante Bombay, elle est devenue de fait la gardienne de la vieille synagogue. Quand des promoteurs proposent de racheter le terrain pour y construire un hôtel, elle s’insurge et remue ciel et terre pour faire échouer leur projet. Sa seule arme ? Sa cuisine, succulente, pleine de couleurs et de saveurs. Poulet à la noix de coco, plats épicés à la cardamome et au safran, galettes de pois chiches à l’oignon et à la coriandre, curry de mouton au piment rouge, accompagné de pommes de terre à l’ail et aux clous de girofle, poisson à la mangue verte… Chaque chapitre est précédé d’une recette (une raison de plus d’acheter ce livre des merveilles), et constitue une part de l’histoire de la religion juive. Avec ses plats, elle réussira à convaincre un jeune avocat taciturne de monter au créneau, fera revenir sa fille en Inde et retournera (comme une crêpe) l’épouse du promoteur. Ici, la tradition passe par la table. Si vous cherchez la recette du bonheur, la Halva, gâteau au sucre, à l’extrait de vanille et à la noix de coco vous mettra sur la voie.

Autre continent, autre format d’écriture. La Vietnamienne Than-Van Tran-Nhut égrène, elle, les recettes au gré de courts récits. Le Palais du Mandarin s’articule autour de nouvelles ayant pour thème les plats (amuse-gueules, soupes, dessert, goûter), des aliments (lait, brioche, thé). Un voyage culinaire et spatiotemporel dans la Chine, la Cochinchine, la péninsule indochinoise, les Etats-Unis et le Jura… étapes des souvenirs autobiographiques de l’auteure. Jujubes de Serinde, cerises du Shensi, kakis du Honan, carpes blanches d’Anwhei, gingembre séché du Chekiang, voisinent avec le lait frais tiré du pis de la vache jurassienne. Than-Van Tran-Nhut s’amuse à mélanger contes et anecdotes contemporaines. Où l’on voit un chef d’armes présenter au duc de Bourgogne lors d’un banquet, un faisan vivant, ceint d’un collier d’or, pour le conjurer de porter secours à la chrétienté. Les mets les plus fins sont aussi les plus redoutables, antidotes contre la stérilité, poisons et extraits du paradis… A ceux qui les maîtrisent, bien des pouvoirs seront octroyés. Ou comment rétablir l’équilibre entre le macrocosme et le microcosme.

"le palais du Mandarin" de Vant Tran Nhut

Le livre de Rachel d’Esther David, traduit par Sonja Terangle, Editions Héloïse d’Ormesson, 304 p., 21 euros.

 

Le palais du Mandarin de Than-Van Tran-Nhut, Nil Editions, Exquis d’écrivains, 108 p., 12 euros.

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