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L’esprit de la renarde

Tran-Nhut

Philippe Picquier • 2005

Jean-Marc Laherrère

 

Loin (au Vietnam), il y a longtemps (au XVII° siècle), revoilà, pour sa cinquième aventure, l’irrésistible mandarin Tân créé par les sœurs Tran-Nuth. De retour vers le Nord de l’empire, en compagnie de son compère, le Lettré Dinh, il s’arrête dans le port de Faifo, où le Lettré compte bien profiter de l’intense vie culturelle du lieu. Tân lui, est pressé de revenir au Nord et de quitter ce Sud qui respecte de moins en moins l’autorité de l’empereur et prépare, de plus en plus ouvertement, une rébellion. Malheureusement, le deuxième soir, Dinh se fait piéger et se retrouve accusé du meurtre de la mère Prune, la propriétaire d’une gargote de la ville. Cela suffit à le faire jeter en prison. Tân demande alors au monsieur Canh, le seul fonctionnaire honnête et travailleur du tribunal, de lui permettre d’enquêter pour innocenter son ami. Il apprend à l’occasion que depuis plus d’un an, un cannibale sévit dans la région. Il a déjà mangé quatre adolescents l’année passée, et il vient de déguster quatre mamies. Comme la fois précédente, il a envoyé au tribunal deux mains et deux pieds accompagnés d’un mot sarcastique signé : Le Gourmet.

On prend une fois de plus beaucoup de plaisir à retrouver Tân et Dinh, et la truculence de leur auteur. Les scènes d’action sont toujours aussi réussies, les scènes gastronomiques et érotiques toujours aussi réjouissantes. Derrière une construction sans reproche, c’est le plaisir et la jubilation qui restent les sensations dominantes de cette cinquième aventure. A ce titre, la palme revient à une scène hilarante qui voit Tan et deux sbires aux prises avec quatre mémés déchaînées, persuadées qu’ils vont les empêcher de retrouver, par miracle, leur jeunesse. Pourtant, le constat est sombre, la période décrite particulièrement troublée et annonciatrice de drames. La fin du roman, plus particulièrement, est poignante dans sa violente charge contre une société qui écrase sans pitié ceux qui sont différents. Poignante et très actuelle. Une fois de plus, les bons auteurs arrivent à faire réfléchir en faisant rire et sourire.

© 2005 europolar